C'est dur la vie.

Ray entra dans la boutique à la suite de son maître, observant les lieux avec une curiosité toute scientifique. C'était vraiment un drôle d'endroit, avec des vêtements partout.

Même si on ne l'aurait pas dit, l'espèce de machin en lambeaux qu'elle avait sur le dos avait autrefois été une robe de prêtresse de Kithahara, puisque de là où elle venait il n'y avait à peu près que ça. Donc un magasin de vêtements, connaît pas.
Donc pour choisir, en soi(e), ce fut coton.

Une petite demi-heure plus tard, après avoir tourné en rond comme un panda en cage entre les rayons, Ray avait trouvé trois jupes et cinq hauts plus ou moins valables, qu'elle devait essayer. C'était gris, noir, brun, extrêmement sobre... Et particulièrement couvrant. En gros, elle était de nouveau habillée comme une nonne, avec une jupe gris clair qui tombait jusqu'à ses chevilles et un pull à col roulé noir.
Mais étrangement, ça lui allait bien.

Elle avait encore plus l'air d'un spectre éthéré, mais on ne dira rien. Pensive, elle se regardait dans le miroir avec attention. Elle n'avait jamais beaucoup attaché d'importance à son apparence, et croiser un miroir avait toujours quelque chose... d'effrayant. Une vendeuse, attendrie par le spectacle de Ray devant sa propre image, l'air si perdue, vint lui proposer de l'aider.
Oh, bien sûr, elle essaya de lui refourguer des choses plus colorées et plus courtes, mais la jeune esclave avait tellement peu l'habitude qu'elle refusa. En désespoir de cause, la vendeuse lui donna un ruban pour attacher ses cheveux. Au moins comme ça elle serait totalement présentable, puisque les bottines que Ray portait depuis des millénaires au moins avaient survécu au passage dans le bateau des esclavagistes.

La vendeuse noua le bout de tissus autour de la natte de la jeune femme, qui regarda son maître avec un air indécis. C'était bien ?

Grey s'était assis sur une banquette à l'entrée et s'était mis à détailler chaque vêtement des étalages autour de lui. Il avait toujours détesté faire les boutiques. Pour lui, le premier bout de tissu potable à se mettre sur le dos était bon, et il chipotait pas. Il essayait juste de pas mettre des choses pas trop flashy, c'était son seul critère de sélection.

L'étalage en face de lui reprenait toutes sortes de jupes et pantalons assez courts et courtes. Les modes avaient bien changé, en huit mille ans... De son temps, y'a neuf mille ans, personne n'osait sortir sans armure ou autre du genre sur le dos, de peur de se faire embrocher par une flèche dès qu'on mettait le nez dehors. Aah, c'était l'bon temps, ça.

Quand, finalement, on lui demanda son avis pour quelque chose, il regarda à peine, ne se souciant que de partir au plus vite de là, puis dit à la vendeuse :

"C'est très bien. On prend tout. Combien?"

Grey la fit se presser, ils mirent tout dans un grand sac, que Ray fut obligée de porter elle-même en sa qualité d'esclave, et Grey paya le tout. Une fois dehors, le neko psychopathe poussa un gros soupi de soulagement avant de demander :

"Bien. On a tout le mobilier à acheter et faire livrer chez nous, maintenant. On commence par où? Tu as besoin de quelque chose pour ta chambre?"

A la question, Ray haussa les épaules et secoua négativement la tête.
Elle avait un matelas ; c'était amplement suffisant pour elle. Elle suivit son maître jusqu'au magasin suivant, un air assez songeur sur le visage.
Dans un couvent, il n'y avait jamais besoin de beaucoup de meubles. Elle se demandait bien pourquoi Grey voulait remplir cette maison de choses inutiles.
C'était plus pratique pour faire ses griffes, certes, mais pour ne pas se prendre des armoires dans la face, c'était autre chose. Elle sourit imperceptiblement en songeant que, si les meubles pouvaient parler, avec elle, ils protesteraient souvent.

Ils arrivèrent dans l'endroit.
Rempli de choses inutiles. Même pas un arbre, un panier ou un coussin assez grand que pour se rouler en boule dessus.

Une heure plus tard, ils ressortaient de la boutique, et Ray ne comprenait toujours pas la raison de ces achats. M'enfin soit. Peut-être que quand elle pourrait se pelotonner dans un fauteuil, elle finirait par capter, qui sait.

Après un rapide passage au marché, ils rentrèrent, et la jeune esclave, après avoir déposé son paquet dans sa chambre, descendit préparer le repas du midi. Laborieusement, elle parvint à faire quelque chose qui ressemblait à des saucisses grillées. Ce n'était pas encore tout à fait au point, mais les carottes accompagnant masquaient le goût de la viande trop peu cuite. En somme, ce n'était pas trop trop mauvais. Avec de l'entraînement, elle pourrait même devenir bonne en cuisine. On ne sait jamais.

Un repas et une vaisselle plus tard, Ray était plantée devant son maître.
Attendant les ordres.

"Qu'est-ce que dois faire ?"

Grey avait acheté pas mal de meubles, pour que chaque pièce soit un peu mieux remplie, et que ça soit plus agréable à vivre. Parce que une maison, même petite, totalement vide, c'était pas forcément joyeux. Pendant que Ray préparait le repas, le psychopathe avait fait usage de ses bons vieux muscles en disposant de façon pratique les meubles dans le salon et la cuisine et en montant quelques étagères dans les pièces du haut.

Il avait aussi acheter divers coffres à cadenas renforcés pour mettre dans la pièce où il comptait entreposer ...ce qu'il comptait entreposer. Logique non? Il allait pas entreposer là-dedans ce qu'il ne comptait pas entreposer, c'est pourtant clair! Il avait aussi acheté un coffre à clef pour mettre son argent. Sa petite tirelire, en gros. Il commençait à avoir confiance en Ray, mais il ne voulait pas courir de risques.

Après le repas, il vit qu'elle attendait les ordres. Il réfléchit un instant, puis dit :

"Donc... Avant tout, j'aimerais te demander quelque chose. Non pas que j'ai honte de toi, mais si on te demande pour qui tu travaille, tu réponds que ton maître est un vieux chnoque désagréable qui ne sort jamais de chez lui. Je veux que tous ignorent que j'ai une cachette ici."

Il marcha ensuite vers l'escalier et dit :

"Ensuite, pour ce que tu dois faire... Je suis las, et j'aimerais un bon bain pour me relaxer... Rejoins-moi là-haut, et monte les parfums et savons que nous avons acheté tout à l'heure."

Il monta lui-même, et passa un coup d'oeil par la porte de la chambre de son esclave, et vit le paquet renversé sur le matelat. Il cru voir quelque chose et puis... passa son chemin, avant de revenir en arrière, intrigué. Il rentra silencieusement dans la pièce et ouvrit le paquet. Et là, paf! surprise. La vendeuse avait apparemment glissé un petit cadeau avec les achats...

Grey se demanda quelle tête ferait son esclave en découvrant cela. C'est vrai, de ce que le psychopathe savait, jusqu'à présent, elle n'avait encore jamais du porter de sous-vêtements. Surtout de ce goût-là. C'était disons... Fait en vue d'une économie certaine de tissu.

Il passa ensuite dans la salle de bain et se mit à enlever sa tunique tandis que l'eau commençait à remplir la grande baignoire...

Le paquet un peu lourd dans les bras, Ray tanguait dans l'escalier.
Gauche... Appui sur la rampe... Rétablissement à droite... Houlà ça penche...
Bref, on aurait dit un navire en pleine tempête. Les escaliers n'étaient pas droits, je vous jure. Une fois arrivée en haut, elle fila dans la salle de bain, sans prendre le temps de se changer avant. Elle ne vit donc pas le petit cadeau -ou l'erreur- de la vendeuse, et c'est tant mieux pour elle. Elle aurait sans doute tenté de mettre une culotte sur sa tête, douée comme elle l'était. Bref.

Elle se rendit donc dans la salle de bain, et rangea les choses une par une sur le rebord de l'évier, de la baignoire, ou encore sur une petite étagère placée là en prévision.
Bon, elle avait un peu de mal à ce que l'arrangement soit logique, mais passons.

Elle apporta à Grey ce dont il avait besoin pour se laver, se penchant sur le rebord de la baignoire. Se penchant dangereusement, d'ailleurs, vu sa petite taille.

Elle se rattrapa de justesse pour ne pas tomber dans l'eau, mais finit tout de même assise sur le rebord. La jeune femme adressa une moue d'excuse à son maître.

"Vous avez encore besoin quelque chose ?"

Pour plus de sécurité, elle restait assise, mais elle était dans les starting blocs. Elle détestait elle-même qu'on la surprenne pendant sa toilette, qu'elle soit humaine ou animale. Et elle avait très envie d'aller se changer, maintenant qu'elle en avait la possibilité.

Mais elle avait fini par comprendre qu'il valait mieux s'informer avant de partir.

Grey poussa un profond soupir en se glissant dans l'eau chaude. Ca, c'était agréable. Quand Ray vint enfin apporter le nécessaire pour se laver, qu'elle disposa le tout, et après qu'elle ait faillit se tauler une ou deux fois dans la baignoire, le psychopathe se rendit compte que, en fait, il aurait bien aimé qu'elle soit tombée.

Lorsqu'elle demanda si elle ne devait rien faire de plus, Grey hésita un instant, puis fit non de la tête. Elle s'éloigna donc alors d'une façon tout à fait logique, mais le psychopathe dit alors, précipitamment :

"Attends! Finalement, j'aimerais te demander quelque chose..."

Il ne savait pas comment présenter la chose. La veille au soir, ça avait été facile: il lui avait simplement montré ce que c'était, en guise d'excuse. Là, il faudrait la jouer encore plus bourrin, ça paraissait inévitable. Enfin, il pourrait ruser un peu... C'était un chat, après tout. Il était d'une nature joueuse. Se la faire avec son accord, c'était un petit challenge.

Et puis, comme elle était son esclave, en plus, les soirs où il ne serait pas motivé, il pourrait l'arbrer* quand même, en ordonnant.

"Je suis extrêmement las... J'aimerais que tu me laves. Et viens dans le bain en même temps, ainsi tu pourras te laver du même coup. On épargnera un peu d'eau. Ca coute cher, de nos jours. De mon temps... Enfin bref. Viens."

La baignoire était grande, il y avait largement assez de place pour deux. Grey se déplaça néanmoins un petit peu pour l'inviter d'un geste du bras à exécuter ses ordres. Même si ceux-ci avaient été dit gentiment, ils ne laissaient pas le choix à Ray.

___
*Arbrer : Synonyme de bai...

Ray regarda son maître d'un air perplexe. Ça, ce n'était pas franchement le genre de choses qu'elle pouvait comprendre. La toilette, c'était tout de même privé, non ?
C'est vrai que partager le lit de Grey, c'était moins intime, hein.

Ray avait un sens social à toute épreuve.

Mais comme elle ne voulait pas d'ennuis, elle laissa tomber sa robe à ses chevilles et se glissa dans l'eau, une expression limite choquée sur le visage. Elle s'enfouit sous la surface liquide jusqu'au menton, avant de se rapprocher du neko pour accomplir sa tâche. Enfin, se rapprocher. Elle restait loin, aussi loin que ses bras le lui permettaient.
Parfois, elle n'aimait pas être petite.

Enfin, mise à part ça, la situation n'était pas si mauvaise. L'eau était chaude, et dégageait une odeur bien différente de la puanteur des rues bondées de Galiä. Simplement, l'esclave se méfiait. Parce qu'elle ne voyait pas ce qu'elle faisait encore là. C'était louche tout ça.

"Comment vous voulez je fais ?"

Même si la voix était peu engageante, au moins, elle s'informait. Et, regardant toujours Grey du coin de l'oeil, elle se tourna vers le coin où elle avait posé divers flacons. Ça sentait fort, par là, et puis ça avait été désigné comme "savon", donc probablement qu'elle devait chercher par là... Mais il y avait trop de ces bouteilles, faites de l'étrange matière appelée pläs tick, différentes.

Bizarrement, ça ne l'inspirait pas.

Grey sourit à la voir ainsi gênée. Il était vrai que les gestes et actes qu'il posait devaient la troubler au plus haut point. Avec son éducation de parfaite petite nonne, il allait devoir la dévergonder... Au moins un peu. Pas trop non plus, sinon, ça serait moins drôle.

"Tu prends du savon dans les mains, et tu frottes. Simple non?"

Le psychopathe s'approcha d'elle, vu que elle semblait garder ses distances. Il lui présenta son dos, pour qu'elle le frotte. En fait, même si c'était plus pour faire un deuxième tour de manège qu'autre chose, ça le relaxerait de se faire masser/laver, après une journée passée à faire du shopping.

S'il y avait bien une chose qu'il n'avait jamais compris ue certaines personnes aiment faire, c'était bien ça; les magasins. Non, parce que, quand même, luia vait des moeurs plutot étranges. Alors il ne regardait pas les passes-temps des autres avec un oeil trop critique... Mais ça, quand même... C'était inhumain.

"Ca va aller, Ray?"

Ray mit du savon au creux de sa main avec une mauvaise volonté évidente, mais entreprit tout de même à frotter le dos de Grey du mieux qu'elle le pouvait. Elle concentra son attention sur les bulles qui se formaient sous ses mains. Ray avait toujours adoré les bulles : colorées, légères. Jolies.

Elle répondit à la question par l'affirmative, d'un air assez absent :

"Oui oui..."

Mais quand elle se rendit compte qu'il y avait un peu trop de bulles parce qu'inconsciemment elle remettait du savon toutes les dix secondes, elle secoua la tête pour se réveiller un peu. Hypnotisant, ce machin.

Maintenant que le neko avait le dos propre, elle réitéra sa question, toujours aussi mal à l'aise.

"Voilà. Avez encore besoin moi ?"

Non parce que bon... Cette situation était au moins aussi étrange et surréaliste que celle de la veille au soir, ou plutôt très tôt ce matin là. Enfin, étant donné la chronologie des évènements, sans doute légèrement moins tout de même, mais ça, ç'aurait été d'un point de vue logique et normal. Et le point de vue de Ray n'était, selon toute vraisemblance, ni logique, ni normal.

Grey ferma les yeux, se laissant masser sans rien dire.
C'était vraiment une bonne idée, finalement, d'avoir acheté une jeune fille comme esclave...

C'était plus agréable d'avoir une jolie jeune fille, mais sauvage, devant les yeux qu'un vieux tout rachitique, mais obéissant sans discution aucune. Enfin, il commençait à la dompter, maintenant...

C'était dingue ce qu'il arrivait à lui faire faire en moins de deux jours.

Il se retourna, regardant Ray dans les yeux.
Il réfléchit pendant un moment avant de répondre, un sourire pervers sur le visage :

"Tu peux laver le reste, maintenant..."

***
Une heure plus tard...

Grey déposa Ray, qui s'était assoupie après l'effort (huuum hum.) dans son lit.
C'était agréable de l'avoir.
Il se demandait s'il n'allait vraiment rester que deux semaines ici... Le travail, toujours le travail...

Il voyait d'ici Kithahara arriver dans un corps de mortelle pour l'engueuler, et lui dire de se mettre à faire son boulot plutot que de se taper son esclave.
Mais bon...

Ensuite, il alla lui-même se coucher pour un gros dodo.

Ray se reveilla environ une heure plus tard, un peu comateuse. Mais bon. Ca aurait pu etre bien pire. Dans les environs d'un psychopathe, etre seulement "comateuse", c'etait tres bien, non ?
Elle mit un certain temps a percuter qu'elle se trouvait dans la piece impersonnelle faussement appellee sa chambre.

Elle se leva, tituba un instant, mais se reprit rapidement, et s'habilla, meme si dedaignant les habits etranges que la vendeuse avait mis dans le paquet a son attention. Elle hesita quant a savoir si elle allait en parler a son maitre ou pas, puisqu'il n'etait pas sense (hum huuum) les avoir vus.

Finissant de passer, pour la premiere fois depuis longtemps, une tenue decente, elle entreprit de descendre dans la cuisine, meme si elle jeta un passage un regard curieux vers la chambre de Grey. Elle supposait qu'il etait dedans, puisque la porte etait entreouverte. Elle haussa les epaules et passa son chemin, allant preparer d'elle meme le diner. Brave bete, tout de meme.

Tout en cuisinant -approximativement- un repas correct qui se limitait a des saucisses achetees un peu plus tot accompagnees de salade, elle se mit a reflechir, ce qui n'etait pas specialement habituel.
Elle etait dans une situation... Particuliere, tout de meme.

Un jour, elle serait libre.
Na.

Grey s'éveilla doucement en s'étirant à la manière d'un chat. Il cligna des yeux, se gratta l'oreille , puis se leva. Il se déplaça avec lenteur vers la porte de sa chambre. Il la passa en baillant, puis s'habilla rapidement, avant de descendre à son tour les escaliers.

Le psychopathe arriva dans la cuisine et vit Ray préparer le diner. Il sourit, en se disant qu'il avait vraiment réussit à lui inculquer certaines notions et obligations très vite, décidément. Il s'assit à la table, et, une fois que son esclave lui servit le repas, il décida que, pour changer, ils allaient discuter au cours de ce repas.

"Ray... Que penses-tu de tout ça?"

Il ne savait pas trop quoi dire, même s'il avait envie de parler. Comme à son habitude, il ne comptait pas tourner autour du pot. Lui, le tact? Pas connaître.

"Jveux dire que je commence à avoir confiance en toi. J'espère que j'ai raison. Donc est-ce qu'être esclave te convient ou bien voudrais-tu que..."

Lui, du moment que la maison était gardée, ça lui était égal. Que ça soit par un esclave ou quelqu'un de libre. Mais il ne voulait pas non plus la libérer trop vite... Certes, il n'était pas dans son intention qu'elle reste sa chose personnelle à long terme. Il voulait juste être obéit quand il le fallait. Et comme il ne serait sans doute pas souvent à la maison...

"Enfin, non, rien."

Il valait mieux encore attendre un peu. Il s'embrouillait lui-même dans les méandres de ses pensées. Même lui ne se retrouvait plus au milieu de toutes les envies contradictoires qu'il éprouvait. Faudrait vraiment qu'il pense à se faire soigner un de ces quatre.

Quand son maître lui adressa la parole, Ray était en train de couper une carotte, étant donné qu'elle avait renoncé à nettoyer la salade par manque d'expérience. Concentrée dans sa tâche, elle ne l'avait pas entendu arriver.
Conséquence de quoi, elle avait sursauté.
Conséquence de quoi, elle s'était fait une jolie entaille bien profonde dans l'index, et avait émis le bruit caractéristique des gens qui se blessent stupidement, celui qui ressemble à un feulement de chat en colère.
CQFD.

Par pur réflexe, elle mit son doigt ensanglanté en bouche, et se retourna, adressant un regard noir au Neko pendant qu'il continuait à parler sans paraître s'aperçevoir de la chose. Heureusement : ça offrit à la jeune esclave le temps de se rappeller en face de qui elle se trouvait et de corriger son regard.
Un gentil petit regard. Noir tout de même, mais bon. On progressait.

Elle finit par hausser les épaules, voyant qu'il ne finirait pas sa pensée, et se réattaqua à sa carotte. Pas simple, quand on a jamais manié un couteau de sa vie. Parce quand on peut se transformer en panda, on mange plus de bambou qu'autre chose.

Le découpage du légume à une main fut d'autant plus laborieux qu'elle devait se concentrer deux fois plus pour ne pas serrer les mâchoires comme elle le faisait d'habitude quand elle essayait quelque chose. Mine de rien, même si il était amoché, elle y tenait, à son doigt, et se le couper avec les dents pouvait être très douloureux. Si si.

Elle finit tant bien que mal le repas, à une main, Grey semblant plongé dans ses pensées.
Ray lui servit son assiette, avec un repas à peu près correct compte tenu de son âge mental (à elle xD) et de ses capacités ménagères limitées. Elle se servit ensuite, avec des mimiques d'acrobate en plein exercice : Ne pas lâcher l'assiette, mais ne pas non plus utiliser sa main droite.

...Quelle galère, la vie d'esclave.

En effet, Grey n'avait pas vraiment remarqué l'infirmité passagère de Ray tant ses pensées le rendait fou. Il n'arrivait pas à choisir ses priorités. Il se serait bien accordé une petite pause, histoire de souffler un peu. A la fin du repas il poussa un long soupir. Il réfléchissait trop. Ce n'était pas dans ses habitudes de réfléchir. Kithahara lui paierait ça, et cher. Il en attrapait mal de crâne. Fallait qu'il tue quelqu'un.

Il leva la tête et posa son regard sur son esclave qui, elle, n'avait pas fini de manger. Il se dit que, finalement, il pouvait faire mieux que tuer pour se détendre, vu la jolie jeune femme qu'il s'était acheté... Enfin pour ça, c'était peut-être pas tout à fait le moment. Il se leva.

"C'était presque bon. Je t'achèterai des livres de cuisine. Cette après-midi tu vas passer le balais au rez-de-chaussée, y'a de la poussière partout. Quand tu auras fini, tu pourras faire ce que tu voudras pendant une petite heure, sauf si je change d'avis d'ici-là. Pendant ce temps, j'ai deux trois petites choses à aller chercher..."

Grey prit son épée, et passa la porte d'entrée en la fermant à clef derrière lui. C'était débile, vu que l'esclave pouvait très bien passer par une fenêtre hein, mais bon, il préférait que ça soit ainsi.

Il vola une monture à l'écurie la plus proche et alla faire quelques courses... Enfin, quand je dis "courses", ça se résumait à trucider les pauvres voyageurs qui essayent de rallier Galiä et de voir après ce qu'il pouvait récupérer.

Quand il revint deux ou trois heures après et qu'il poussa la porte d'entrée il trainait derrière lui un grand sac. Il monta directement l'escalier sans se soucier de savoir où était Ray dans la maison et déposa le sac sur le palier. Il ouvrit la pièce pour l'instant vide et la remplit d'armes fraichement dérobées et de l'or qu'il avait su avoir en faisant son métier de brigand.

Il avait aussi trouvé une petite collection de vêtement supplémentaire pour Ray. Deux trois robes, quatre hauts et deux pantalons en toile. Il aurait put en avoir plus, mais les autres avaient été abimées lors de leur récupération...
Il avait aussi trouvé quelques bijoux, il ignorait si Ray en mettait. Il pourrait toujours les revendre.

"Ray! Ramènes-toi. J'ai quelque chose pour toi, viens voir."

Quelque part à l'autre bout de la maison, ce fut un petit panda blanc et noir qui s'éveilla, un peu groggy. En effet, quand Ray dormait, elle se transformait inconsciemment, de temps à autres. Elle s'étira, d'une manière très peu pandatesque puisque son premier réflexe fut de se mettre sur deux pattes. Logique : elle croyait se réveiller en tant qu'humaine.
Quelle ne fut pas sa surprise de tomber lourdement sur son arrière-train, dans une posture habituellement réservée aux peluches et autres machins mignons.

Depuis le tas de chiffons qu'elle avait installé dans un recoin sombre derrière le montant de la cheminée pour elle y dormir en paix, elle tendit l'oreille.
Rien.
Okay, redodo.
Se sentant un peu à l'étroit dans son refuge, elle se changea en chaton, et alla se blottir tout en dessous des bouts de tissus, tout contre la paroi chaude de la cheminée. Bonheur.
Le seul témoin de sa présence était le léger ronron qui se fit entendre. Elle ne se doutait pas qu'on l'attendait à l'étage... Et un chat dort toujours aux endroits les plus inattendus.

Elle n'était pas une exception, bien qu'elle ne fut pas toujours chat.

Il n'y avait plus qu'à espérer que Grey était soit doué au jeu de piste, soit très zen... Parce qu'au lieu d'imaginer la jeune esclave en train de se vautrer avec béatitude dans la chaleur d'un recoin perdu, il pouvait tout aussi bien la croire enfuie. Et si c'était le cas... Pauvre Ray.

Au bout de deux minutes d'une attente qui lui parurent bien plus longues, le neko venu des temps anciens perdit patience. Il n'avait pas l'habitude d'avoir à attendre. Il laissa tout là et utilisa sa partie chat pour chercher l'odeur de la servante. Il fouina du côté de la porte et des fenêtres, mais n'y releva pas de traces récentes de Ray. Elle n'avait pas quitté la maison.

En toute logique, elle était donc terrée quelque part. Il l'aurait vue si elle était sous sa forme humaine, elle était donc changée en quelque chose, du genre une souris ou une mouche, ou tout autre animal minuscule. De plus, il savait qu'elle le craignait suffisamment pour ne pas lui désobéir de façon aussi délibérée. Elle devait donc être inconsciente. Soit elle s'était hypothétiquement blessée en faisant le ménage, soit elle pionçait quelque part.

Et il trouverait où. Il fouilla les moindres recoins de la cuisine, du couloir, du salon, et de tout l'étage sans succès. Ca commençait à le gonfler.

"Bon je repasse encore vite fait une fois dans le salon puis tant pis pour elle, je revend ses robes. Même si à mon avis elle s'en tape complètement. Mais pourquoi j'me casse la tête?"

En plus il parlait tout seul, ça s'arrangeait pas. Après avoir parlé, il fit place à un grand silence. Quoique troublé par un certain ronronnement venant de la cheminée... Alors elle était là. D'une voix très forte il ordonna :

"Ray, tu te réveilles tout de suite, s'il te plait."

Au son de cette voix particulièrement... amicale, Ray se réveilla en sursaut, manquant de peu de se prendre le bord brûlant de la cheminée. Ca aurait fait punk inversé : une ligne crâmée au milieu de la fourrure.
Enfin soit.

Elle se traîna, un peu dans les vapes, hors de son tas de chiffons, en s'étirant et s'ébrouant énergiquement. Du nerf, que diable.
Et la jeune femme finit par s'asseoir sur le tapis devant la cheminée. Elle se retransforma en humaine, et bâilla un grand coup, à poil devant le feu ouvert. Mine de rien, c'était agréable.

"Oui maître ?"

Mais elle semblait ne pas oublier les politesses. Sortant un peu de son coma post-siestal, il lui vint à l'esprit que Grey n'avait pas forcémeeeent l'air content. Si peu. Elle s'enquérit de la chose avec une moue mi inquiète mi troublée.

"Quelque chose va pas ? Ai fait quelque chose mal ?"

...A part le fait de se retrouver une ènième fois sans sa robe bien sûr. Quoi ? C'est pas mal ? Mais si, mais si.

Grey avait vu juste. Il soupira et ferma les yeux. Il allait finir par l'attacher à un piquet quelque part, si elle continuait comme ça. Il fit craquer les os de ses poignets et rouvrit les yeux après que l'esclave eut parlé. Il fut dans un premier temps surprit qu'elle soit nue comme un ver, puis se rappela que c'était le plus logique du monde. Il se racla la gorge et reprocha :

"De mal? Rien. Justement, t'as rien fait. Quand je t'appelle, j'aimerais ne pas avoir à retourner la bicoque pour te retrouver en train de roupiller bien au chaud."

Là, il avait presque envie de la punir. Suivant la pure logique masculine, le fait de la voir nue ainsi devant lui lui soufflait quelques idées de "punition". Il eut un très léger sourire pervers l'espace d'une demi-seconde puis reprit son air froid habituel. Il continua de parler :

"J't'ai trouvé des vêtements supplémentaire. Faudrait faire le tri, elles sont sans doute pas toutes à ta taille. Et t'étonnes pas si y'a un peu de sang dessus."

Il se tourna ensuite vers l'escalier en faisant un petit signe de tête.

"J'ai tout bazardé sur le pallier. T'iras voir."

Pour finir, il s'approcha dangereusement d'elle, passa ses mains le long du dos de son esclave, et les fit plutôt très baladeuses au niveau de ses hanches et de ses fesses, avec un regard bien pervers dans les yeux.

"Il va falloir que tu te fasses pardonner, avant."

Ray hocha la tête, pas causante comme à son habitude. Elle se demandait tout de même pourquoi il persistait à vouloir l'habiller puisque a), il passait son temps à lui enlever ses fringues et que b), elle se plaisait bien mieux sous une forme animale. En plus, la maison étant plus ou moins en ordre et propre puisqu'elle y avait vaguement occupé son après-midi avant sa sieste, elle pouvait dormir, et donc maintenir sa métamorphose. Mais apparemment, son maître préférait quand elle était humaine. Lui seul savait pourquoi.

Quand il la toucha, elle se cambra sous la caresse, se surprenant elle-même par la violence de sa réaction, avant de se dégager d'un mouvement fluide, avec un air innocent sur le visage. Non non, elle ne s'esquivait pas. Elle prenait juste un peu de distance pour conserver un air docile sans qu'il puisse l'en départir. Mais si, mais si.

"Comment ?"

...Et non, elle n'avait toujours pas capté le principe. Enfin peut-être que si, en fait. Mais elle n'imaginait pas vraiment que Grey puisse appliquer ça comme punition, puisque c'était agréable. A moins bien sûr qu'il ne change les habitudes nouvellement établies, elle n'avait pas de raison de penser à ce à quoi il pensait en termes de châtiment pour sa "négligeance"...

Elle se coucha sur le ventre sur le tapis devant la cheminée, quelques centimètres plus loin, tout en posant sa brêve question. Pas encore bien réveillée de sa sieste, elle. C'est rien, ça allait venir.

Quelque part, la semi-innocence totale de Ray et cet air toujours un peu absent excitaient beaucoup certaines parties de la personnalité de Grey. Rien que pour ça il ne lui trancherait pas la tête sur un coup de... tête. Il allait la garder et continuer ainsi jusqu'à ce qu'il trouve Kithahara. Enfin, au moins jusqu'à ce qu'il trouve par o commencer à chercher. Il s'accroupit juste devant la tête de Ray et commença à défaire sa ceinture en disant :

"Un peu comme hier, et avant hier, sauf que là c'était pas pour te faire pardonner."

***
Plus tard...

Grey remit son futal, et fit se relever Ray, toujours aussi nue. Bien, maintenant qu'elle avait eut droit à sa punition (huhuuum~), il allait pouvoir jouer à la poupée et l'habiller un peu. La première chose : lui apprendre ce qu'étaient des sous-vêtement. Et ce vu que, visiblement, elle n'avait pas porté ceux que la vendeuse avait glissé dans le paquet l'autre jour... Ca semblait logique qu'elle n'en ai jamais mis avant...

Il l'emmena jusqu'à l'étage, alla dans sa chambre, et sortit le soutien et la culotte que Ray avait à sa disposition.
Sur un ton de professeur gentil et innocent qui explique les tables de multiplications à un gamin de 6 ans, Grey s'informa :

"Sais-tu ce que c'est que ceci?"